⚖️ Civ. 3e, 26 janv. 2022, FS-B, n° 20-23.614
Un copropriétaire peut agir en responsabilité délictuelle contre un autre copropriétaire en raison des dommages qu’il subit même si ces dommages trouvent leur cause dans une partie commune dont celui-ci a la jouissance privative.
Les faits :
L’espèce se situe dans un immeuble en copropriété dans lequel certains appartements jouissent d’une terrasse. D’après le règlement de copropriété et le régime traditionnel des terrasses et balcons en copropriété, ces terrasses sont déclarées “parties communes à jouissance privative“.
L’un des copropriétaires est victime d’infiltrations en provenance de la terrasse de l’un de ses voisins. Le copropriétaire lésé assigne son voisin en justice pour obtenir réparation de son préjudice.
La Cour d’appel saisie rejette la demande de la victime au motif que l’action intentée contre le propriétaire de la terrasse fuyarde aurait dû l’être contre le syndicat des copropriétaires. La demande est donc irrecevable car, argumente le juge du fond, “un copropriétaire n’a pas qualité pour répondre de désordres provenant de parties communes même s’il en est le gardien, et quand bien même il en aurait la jouissance exclusive“.
Le conflit est alors porté devant la Cour de cassation
Le problème de droit :
Le syndicat des copropriétaires a-t-il seul qualité pour répondre du préjudice trouvant son origine dans les parties communes d’un immeuble dont un autre copropriétaire a la jouissance exclusive ? Ou bien l’action en réparation peut-elle être dirigée contre ce copropriétaire ?
La réponse du juge :
Ce cas d’espèce voit la mise en oeuvre des art 14 et 15 de la loi du 10 juillet 1965 :
Art. 14 al.5 : Le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.
Art. 15 al. 2 : Tout copropriétaire peut néanmoins exercer seul les actions concernant la propriété ou la jouissance de son lot, à charge d’en informer le syndic.
Le juge de la Haute Cour cassera la décision de la Cour d’Appel. En effet rappelle-t-il “la responsabilité du syndicat des copropriétaires au titre de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 n’est pas exclusive de la responsabilité délictuelle encourue par un copropriétaire.“
Un copropriétaire peut donc agir directement à l’encontre d’un autre pour des dommages trouvant leur origine dans des parties communes même si celles-ci sont placées sous la garde et la jouissance exclusive d’un autre copropriétaire. Cette action se fonde sur la théorie des troubles anormaux de voisinage ou de la responsabilité délictuelle.